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“Je ne savais pas que pour devenir un jockey, il fallait un jour avoir été cheval.” Voici quelle était la réplique favorite d’Arrigo Sacchi lorsqu’il devait faire face à ses détracteurs qui pensaient que l’on ne pouvait être un grand entraîneur de football sans en avoir été un grand joueur auparavant. En effet, le natif de Fusignano en Italie, défenseur de formation, n’a pas eu la chance de connaître les joies d’une carrière de joueur professionnel. C’est en 1982 qu’il entame sa carrière d’entraîneur professionnel en prenant les rênes d’un modeste club de troisième division italienne (Série C), le Rimini Calcio. Deux ans plus tard, il s’engage avec le club de Parme qui évolue une division au dessus de ce qu’il connaît avec Rimini. Novice dans le métier, il parvient néanmoins à remplir l’objectif prioritaire du club en  maintenant les parmesans en Série B à l’issue de la saison. En 1987, si ses résultats obtenus à la tête de Parme ont un retentissement assez confidentiel au sein du pays à la botte, il est tout de même repéré par un certain Silvio Berlusconi, businessman qui vient de racheter l’AC Milan un an auparavant. Très audacieux, l’homme d’affaires italien n’hésite pas au moment de confier les clefs de son équipe milanaise à Arrigo Sacchi. Une décision qu’il ne regrettera pas. 

Dès le début de son aventure en Lombardie, Sacchi tente d’imposer ses théories et son projet de jeu. S’il n’a pas été un joueur professionnel, il n’en est pas moins un grand connaisseur de football et n’est jamais avare d’idées inédites. A la fin des années 80, alors que le football italien campe sur ses certitudes d’un football défensif, Arrigo Sacchi va imposer son schéma favori du 4-4-2, dans lequel les attaquants seront les premiers défenseurs. Pour lui, l’un de ses principes fondamentaux est que l’équipe doit défendre et attaquer ensemble. Par un pressing très haut et constant, il veut étouffer ses rivaux en récupérant le ballon dans la partie de terrain adverse dès la première relance. Il impose à ses quatre défenseurs d’être constamment alignés ensemble afin de mettre plus facilement hors-jeu les attaquants de l’équipe opposée. Par cette innovation, il rompt avec le principe très prisé par les entraîneurs italiens de l’époque du libéro, ce défenseur placé en couverture derrière les défenseurs de l’équipe et qui oblige par conséquent celle-ci à opter un bloc bas sur le terrain. Néanmoins, ce système de jeu désiré par Sacchi est très énergivore. Afin de préparer ses joueurs au mieux, le précepteur italien les soumet à deux entraînements quotidiens alors qu’ils ne s'entraînaient que quatre fois par semaine jusque-là.

La révolution de Sacchi à dans un premier temps du mal à se faire ressentir au niveau des résultats de l’équipe. Il devra plusieurs fois être confirmé auprès de ses détracteurs par son président Berlusconi, sûr de son choix avec le mage de Fusignano. Sacchi a toujours eu pour habitude de privilégier le collectif à l’individuel. Ainsi, il base son recrutement de joueurs sur les personnalités et les caractères de ces derniers, prêts à se sacrifier pour le rendement de l’équipe. Il s’appuie sur sa bande d’italiens composé de Maldini, Ancelotti ou encore le capitaine Baresi. Mais également sur ses trois stars bataves en la personne de Gullit, Van Basten et Rijkaard pour enlever ses premiers trophées majeurs. En 1988, le Milan de Sacchi est champion d’Italie. Les deux saisons suivantes, le technicien Italien parvient à remporter la troisième et quatrième Ligue des Champions de l’histoire des rossoneri en venant respectivement à bout du Steaua Bucarest au Camp Nou et du Benfica Lisbonne au stade Ernst Happel de Vienne. Ses stars néerlandaises se partageront les honneurs du Ballon d’Or entre 87 et 89. 
Auréolé de ces succès, il prend ensuite la tête de la sélection nationale Italienne qu’il mène jusqu’à la finale de la Coupe du Monde 1994. Bien que n’ayant jamais joué au plus haut niveau, l’entraîneur Arrigo Sacchi aura réussi à se faire une place d’honneur dans le football Italien. Claudio Ranieri, autre légende du football italien, déclare à son sujet en 2016 : “Arrigo Sacchi est arrivé et il a tout changé. C’est lui qui a permis au football italien de prendre un nouveau virage et de s’ouvrir à un jeu offensif.” Le mage aura aussi inspiré ces entraîneurs qui, comme lui, n'ont pas de grande expérience de joueur, mais qui ont eu la possibilité d’exprimer leurs idées au plus haut niveau à l'image des portugais José Mourinho ou encore Léonardo Jardim.

Né en Argentine en 1916, Helenio Herrera Gavilan traverse rapidement l’Atlantique avec ses parents pour rejoindre le Maroc dans un premier temps puis la France. C’est d’ailleurs sur le Vieux Continent que le défenseur argentin effectue la majeure partie de sa carrière somme toute modeste en termes de titres glanés. Retiré des terrains en 1945, Herrera entame sa seconde carrière dans le football en prenant les rênes du Stade Français pendant trois saisons. Durant ces premières années passées à la tête d’un club, il échoue de peu à apporter un premier trophée au club francilien lorsqu’il amène l’équipe jusqu’en demie finale de la coupe nationale. En 1948, celui qui a été naturalisé français franchit les Pyrénées en rejoignant le Réal Valladolid. Le début de sa carrière internationale et sa moisson de trophée peut alors commencer. 

En Espagne, il entraîne succinctement en 14 ans l’Atlético de Madrid, Malaga, le Déportivo La Corogne puis le FC Séville puis le FC Barcelone avant d’être nommé à la tête de la sélection ibérique. Son impressionnant CV lui permet d'être recruté en 1960 par le géant italien de l’Inter Milan. C’est dans le club lombard que la carrière du tacticien franco-argentin va réellement exploser. En huit saisons sur le banc milanais, il impose son style de jeu basé sur une impressionnante discipline défensive. C’est d’ailleurs sous la houlette de l’entraîneur Herrera que l’équipe fut surnommée par les observateurs Grande Inter tant les résultats étaient impressionnants. Il a pensé et inventé son système en 3-2-2-3 de manière à ce que la disposition des joueurs sur le terrain forme la lettre “M” en phase défensive et “W” pour les offensifs. Son principe de pyramide inversée fait des merveilles : durant son aventure en Lombardie, il empoche plusieurs titres de champions d’Italie et deux Ligue des Champions, ce qui lui vaut le surnom de Signore Mister de la part de ses joueurs. L’Inter était très redoutée au point même d’être considérée comme la meilleure du monde durant les années Herrera. 

Le système mis en place par le tacticien est appelé le Catenaccio ce qui signifie le verrou. Son plan de jeu, fondé sur la rigueur de ses bases arrières, est encore aujourd'hui très ancré dans le football italien. Le terme de catenaccio était pourtant un terme auquel il ne goûtait guère puisqu’il refusait de se voir assimilé une étiquette d'entraîneur au profil défensif. Copié par d'innombrables entraîneurs, Herrera rompt avec les idées de son époque plutôt portées sur l’offensive à outrance au détriment de la solidité défensive.    

Helenio Herrera était un pragmatique. Avec lui très peu de place pour les facéties et les dribbles sans réel apport à la progression du jeu vers l'avant. À la récupération du ballon, ses ailiers étaient sommés de vite se porter en direction du but adverse pour profiter du déséquilibre lié à la contre attaque. C’est d’ailleurs sous Herrera que naît le terme de “couloir” pour évoquer les joueurs évoluant sur la latéralité du terrain. 

Au-delà de l’aspect tactique, Herrera a révolutionné l’entraînement dit invisible des joueurs. Durant ses différents mandats, il a insisté sur l’impact de l'alimentation chez le footballeur. Il fut l’un des premiers à penser qu’une hygiène de vie irréprochable (sommeil réparateur, récupération longue, réduction des activités extra-sportives…)  était indispensable pour performer sur le terrain. La préparation mentale à été également l’un des éléments moteur de son programme d’entraînement notamment en donnant une grande importance au concept de la mise au vert pour ses joueurs et le staff avant les rencontres.

Disparu en 1997, Helenio Herrera a profondément révolutionné le métier d’entraîneur. Il est considéré par ses pairs comme l'un des plus grands techniciens de l’histoire de son sport par l'efficacité et la pérennité de son projet de jeu.

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